Laïcité

Les DDEN  (Délégués Départementaux de l'Education nationale)

L'inquisition laïque

La laïcité en France, c'est l'équivalent du "politiquement correct" aux USA. C'est ce qui reste des valeurs démocratiques après digestion par des bureaucrates inquisiteurs. Ils vous les transforment en normes, en directives officielles, en vérifications, en interdictions diverses, en positions de principe, au point que ces pauvres valeurs en perdent leurs couleurs d'origine.

Le maintien de l'ordre est pour vous une priorité ?
L'inquisition laïque, une démarche citoyenne ?
La Constitution de 58, un horizon indépassable ?
Vous adorerez les DDEN !

La police est partout, et vous conviendrez que cette présence est nécessaire pour lutter contre les malfrats. Sur la voie publique, elle se présente avec un képi. Mais parfois, intelligence suprème, elle guette de façon anonyme, habillée comme vous et moi.
A l'école, c'est pareil. Il existe un maintien de l'ordre éducatif, tout ce qu'il y a de plus officiel. Les meilleurs éléments sont décorés des Palmes Académiques. Et, à côté, des pékins habillés comme vous et moi. Ce sont les délégués départementaux de l'Education Nationale, les DDEN.


C'est une fonction ancienne puisqu’elle remonte à 1793, quand les Conventionnels ont créé les "magistrats aux moeurs". Sous la Terreur, on peut imaginer le nombre de pauvres bougres qu'ils désignèrent pour la guillotine.
La Révolution française a inventé la police politique moderne, avant que les dictatures ne donnent à la fonction ses lettres de noblesse.


Au 19ème siècle :
Pendant l'empire napoléonien, ils font partie des innombrables délateurs qu'emploie le régime. En 1816, ils se recyclent. Ils sont nommés "surveillants spéciaux" et en 1928 "inspecteurs gratuits". Ils sont chargés de surveiller la moralité publique dans les écoles. Ils espionnent les sentiments politiques ou religieux des enseignants, des élèves et des parents d’élèves. Quand le pouvoir est clérical, ils traquent les rouges. Quand le pouvoir est anticlérical, ils dénoncent les blancs.
C’est le mouchard dans toute son ignominie, ce qui lui vaudra au cours de ce siècle l’appellation bien méritée d’ "agent d’intolérance". En 1850, l’inspecteur gratuit devient délégué cantonal.

 
A partir de la IIIème république, la cible du mouchard se stabilise. Le délégué est un "missionnaire laïque et républicain". Les missionnaires républicains en France sont comme les gardiens de la Révolution en Iran. Le pouvoir d’Etat utilise un oxymore pour justifier l’existence des supplétifs qui accomplissent ses basses œuvres.
DDEN_St-Yves
D'un côté, la Bretagne festive ;
de l'autre, la laïcité pisse-vinaigre.
Choisis ton camp, camarade !

Exemple d’action du délégué cantonal
Demande à l’Inspecteur de supprimer les bourses pour un enfant pauvre, dont les parents soutiennent une liste adverse aux élections municipales. (c’est la lettre-type du délateur, avec en dernière phrase, l'expression du courage laïque) 
 
Lanrodec, le 29 juillet 1884,
Monsieur l’Inspecteur d’Académie,
Vous allez, je crois, avoir à examiner un de ces jours un jeune homme de notre commune appelé CHEVANCE Pierre-Marie, à l’effet d’obtenir une bourse au cours Normal de notre Département.
Ce jeune homme, à l’exemple de son père, et même de sa mère, est déjà un réactionnaire militant. A l’occasion des dernières élections municipales, et depuis même, cette famille nous fait le plus de mal possible.
En conséquence, M. l’Inspecteur, je viens vous prier de l’examiner, ou de le faire examiner très sévèrement, et de ne pas lui donner une préférence, s’il y avait doute, que selon moi, il ne mérite pas.
Inutile de vous recommander la plus grande discrétion à l’égard de la présente communication.
GAREL. Délégué cantonal. Membre du Conseil municipal.

La police politique que constituent les délégués cantonaux sont à l'origine de la création de la Ligue de l'Enseignement. le Congrès fondateur se tient les 18, 19 et 20 avril 1881, dans les locaux du Grand Orient de France. Léon Gambetta consacre la Ligue comme organisation républicaine et l'incite à devenir la République en action.

L'embrigadement de la jeunesse est l'idéal de la Ligue. Sa devise ne concerne en rien l'éducation, mais l'exaltation du nationalisme français : 
 "Pour la patrie, par le livre, par l'épée".

En 1882, Le sénateur Georges, franc-maçon de la loge patriotique Alsace-Lorraine, développe un plan d'éducation militaire lors du Congrès de la Ligue.  Il fut largement approuvé. La Ligue ouvrit une grande souscription.
En 1884, lors de son Congrès annuel, la Ligue se prononce en faveur d'un projet de loi instituant la préparation militaire obligatoire pour les élèves. Dans sa pétition, elle considére que l'instruction prémilitaire fait partie de l'instruction primaire.
La Ligue se targue d'avoir embrigadé la jeunesse française dans plus de trois cent bataillons. Elle patronne des fêtes au cours desquelles des fusils sont distribués aux enfants.

Dans la devise de la Ligue de l'enseignement, "par l'épée" ne fut supprimé qu'en 1904.


Ligue de l'enseignement

L'éducation au patriotisme. Question mise à l'ordre du jour du 4ème Congrès (Bulletin de la Ligue  de l'enseignement. N°22. janvier 1884)

"La Ligue française de l'enseignement a déclaré qu'elle prenait en main la cause de l'éducation civique et militaire ; dans ses congrès antérieurs elle a successivement étudié  : en 1882 et 1883 l'éducation gymnastique et militaire, en 1883 l'éducation civique et son développement dans les masses. C'est sur ce point particulier du programme de cette oeuvre que la Société des fêtes d'enfants attire cette année l'attention de la Ligue (...)


... Etant bien entendu que le patriotisme est l'amour de son pays sans haine préconçue et nécessaire contre le reste de l'humanité, il est bon de montrer que cet amour ne doit être ni superficiel, ni platonique, mais profond et actif.
Profond : il veut un dévouement sans réserve, un sacrifice complet de l'être physique et moral.
Actif : il demande l'emploi des moyens extérieurs et des facultés ; il doit exciter à une saine rivalité et, dans la lutte pour l'existence qui se livre entre les nations comme entre les individus, inspirer la sublime ambition d'ouvrir et d'éclairer la voie. (...)

... Pour inculquer ses notions à l'homme et lui apprendre son devoir, il faut agir directement suivant l'âge.
1° L'ENFANT. C'est le citoyen, le patriote de demain. A l'école on agira sur lui en saisissant toutes les occasions de lui donner des leçons directes (comme pour l'enseignement de la morale), - en recherchant soigneusement dans l'histoire de tous les peuples et particulièrement dans l'histoire nationale, les traits propres à faire impression sur son esprit, les exemples de vies utiles et dévouées, - en traitant enfin (pour les plus grands) le sujet d'une façon quelque peu didactique, avec plus de développements que n'en comportent less programmes de l'éducation civique.(...)
2° LE JEUNE HOMME. Du sortir de l'école à l'entrée au régiment, l'esprit et le coeur se forment. Les éléments qui président à cette formation auront été surtout puisés à l'école, à la bienfaisante influence de laquelle nul n'échappera désormais. Pour que le développement commencé puisse se continuer, il faut entourer le jeune homme de toutes ces oeuvres que la Ligue a encouragées ou quelquefois inaugurées : sociétés de tir, de gymnastique, de lecture, d'instruction, bibliothèques populaires, musées cantonaux, etc., afin que, devenu soldat, non seulement il soit apte à défendre et à faire respecter son pays, mais qu'il sache aussi pourquoi il le fait, pourquoi il le doit, et qu'il accepte cette tâche avec une noble satisfaction.
N'y aurait-il pas quelque moyen de détruire peu à peu, dans les campagnes surtout, cette honteuse habitude d'excès d'intempérance, de vociférations, de désordre, auxquels donnent lieu les opérations de tirage au sort et de révision ? Ne serait-il pas sage et patriotique d'instituer à ce moment quelque cérémonie civique, quelque fête digne et sévère qui exerçât son influence salutaire sur tous les citoyens autant que sur les nouveaux défenseurs de la patrie ? Y aurait-il avantage à faire prêter aux conscrits une sorte de serment civique qui établirait un lien plus étroit entre eux et la société qui leur confie ses intérêts ?
Ce sont bien là des questions dignes de fixer l'attention de la Ligue (...)

L'éducation civique et militaire dont il est question plus haut s'est maintenue par la tradition des Lendits (ou Landits, ou Landis). Ces fêtes patriotiques mobilisaient les enfants des écoles laïques pour des démonstrations de marche au pas et de gymnastique. Les défilés laïques de style stalinien, comme les défilés religieux de la même eau, ont sombré au cours des années soixante.

Lendit 1
Lendit à Scaër (Finistère) : cliquer ici
Lendit 2
Lendit 3
Lendit à Brest (Finistère) : cliquer ici

Au 20ème siècle
Une circulaire de 1969  crée la dénomination de "délégué départemental de l’éducation nationale" (DDEN). Les DDEN sont aujourd’hui plus de 25 000.
Ils sont chargés de transmettre aux municipalités et aux autorités académiques toutes informations sur l'état et les besoins des établissements préélémentaires et élémentaires (publics et privés). Ils ont aussi conservé leur antique fonction de mouchard, transmettant toutes les autres informations nécessaires au maintien de l'ordre éducatif.
Ils sont désignés pour quatre ans par l’Inspecteur d’académie, qui choisit généralement des anciens enseignants bien dévoués, bien obéissants, bien dans la ligne.

Le Délégué départemental est membre de droit du Conseil d'école. En 2004, les projets de mise en réseau des écoles intégrent la "mission" du D.D.E.N. au sein des conseils de réseau comme au sein du conseil d'école. Le mouchard est à sa place.
Ils font partie de la commission chargée d'organiser les élections de parents d'élèves, charge qui suppose de l'impartialité.
Parallèlement à cette fonction officielle, la Fédération des DDEN est une des organisations qui composent le CNAL (Comité national d'Action Laïque), auquel adhère aussi une association de parents d'élèves, la FCPE. Il y a là un mélange des genres entre des fonctions officielles, un militantisme tout aussi officiel et des connivences affichées. Toute prétention à l'objectivité ou à la neutralité (ainsi qu'à l'égalité ou à la fraternité) serait évidemment grotesque. La séparation dont les militants de la laïcité nous bassinent, entre sphère publique et sphère privée, ils ne la respectent pas eux-mêmes.
Le DDEN donne des avis au gouvernement. Il donne aussi des avis au Conseil Régional (voir "la St Yves, événement cultuel ?", plus haut). Bref, comme on dit vulgairement, il se la pète.

Au sein d'un Conseil d'école, le DDEN "représente" les intérêts de qui ? Ni des élèves, ni des parents d’élèves, ni des enseignants, ni du personnel administratif, ni d'aucune des parties prenantesLe DDEN est -il l'a toujours été depuis 1793- l'inquisiteur du politiquement correct de la France laïque.
 
Fantasmes DDEN sur  les dangers du plurilinguisme :

Document distribué aux 420 délégués départementaux de la DDEN par Daniel GAUCHON, Inspecteur de l'Éducation Nationale en poste à Pau, juin 1997.

 
«Cinq raisons pour s'opposer au développement du bilinguisme en langue régionale à l'école publique.
Les langues régionales ont sans aucun doute leur place à l'école comme l'enseignement de n'importe quelle langue ou discipline, mais le bilinguisme en langue régionale est incompatible avec les principes et le fonctionnement de l'École Publique.
Il privilégie la culture et la langue d'une "communauté" alors que le rôle de l'école publique est de privilégier la culture et la langue française dans un objectif de cohésion sociale (cf. Programmes de l'École élémentaire 1995)
Il n'offre aucune garantie de cohérence dans les apprentissages scolaires, à plus forte raison lorsque Français et langue régionale sont enseignés par deux personnes distinctes. (On notera que c'est d'ailleurs cet argument de cohérence qui est - à juste titre - invoqué pour demander aux maîtres d'assurer eux-mêmes l'enseignement des langues étrangères !
Il n'est pas fonctionnel car la plupart des enfants qui "subissent" ce bilinguisme ne vivent pas dans un milieu bilingue, seul argument qui pourrait justifier sa présence à l'École Publique. La volonté éventuelle de recréer un bilinguisme là où il n'existe pratiquement plus ne devrait trouver place que dans un cadre extra-scolaire, peut-être à l'occasion de projets d'aménagement du temps scolaire...
Il est extrêmement coûteux en moyens, ce qui pose deux problèmes : celui de la priorité en période de rigueur budgétaire ; celui de l'iniquité au détriment de ceux qui ne peuvent bénéficier eux aussi de tels moyens supplémentaires pour d'autres activités telles que l'informatique ou la musique par exemple Il s'inscrit dans une politique incohérente dans la mesure où l'État finance désormais les écoles privées en langue régionale contre lesquelles ce bilinguisme était censé servir de parade.
Fantasmes DDEN sur l’enseignement par immersion et toute forme d'éducation non contrôlée par l'Etat central :



1er juin 2002 . Communiqué commun aux unions départementales des Côtes d'Armor, du Finistère, de l'Ille-et-Vilaine et du Morbihan au sujet de l'intégration de Diwan dans le service public de l'Education Nationale.
 
Réunies le 1er juin 2002 à TREVE ( 22), les unions départementales des Côtes d'Armor, du Finistère, de l'Ie-et-Vilaine et du Morbihan, tiennent à faire connaître leur position à l'égard de Diwan. Auparavant, il est bon de rappeler ce qu'est la méthode Diwan de l'enseignement du breton par immersion. Il s'agit de faire en sorte qu'un enfant de la petite section de maternelle jusqu'au CE1 n'entende que du breton, n'écoute que du breton, ne parle qu'en breton pendant plus de 8 heures par jour et même 9 heures s'il reste en garderie ! et ceci pendant 6 années ! Il ne parlera en français que de temps en temps à partir du C. E. 1.(dans les plages horaires réservées à l'enseignement du français ) . Extrait des instructions du 30 avril 2002: Cycle 2 : Français : " l'enseignement de la lecture et de l'écriture en français commence au cours du CE1 ". Pour le cycle 3 , hormis l'enseignement du français, l'ensemble des matières est étudié en langue régionale " . D'autre part, en cas d'intégration dans une école publique, pour une bonne immersion, on séparera les petits "bretons" des petits "français" pendant les récréations et la restauration. Les nouveaux textes publiés et signés par Jack Lang ne changent rien à la philosophie de l'association Diwan et ses principes immersifs ne sont nullement modifiés. Il ne suffit pas de supprimer les mots qui choquent pour devenir angélique. Les délégués départementaux des unions précitées, sont unanimes pour rejeter toutes intégrations d'écoles à caractère spécifique comme Diwan et autres sur le territoire français.(...)
 
Assemblée Générale DDEN 2009. Extraits du rapport moral de Daniel Callewaert

L'Etat total remplace la religion totale :
"Les valeurs développées par les religions ne sont que relatives car aucune religion n’est universelle ce qui n’est pas le cas des valeurs que la République garantit. Celles-ci s’appliquent à tous."

Les monopoles sont les garants de la liberté (comme chacun sait) :
"Ce qui précède doit nous démontrer, s’il le fallait encore, que la défense de la laïcité à l’école doit être notre priorité absolue. Il faudrait que nous retrouvions la pugnacité de ceux qui, à Vincennes, le 10 juin 1960 demandèrent : "que l’effort scolaire de la nation soit totalement réservé au développement et à la modernisation de l’Ecole de la nation, espoir de notre jeunesse", serment prononcé par 350 000 personnes représentant plus de 10 millions de signataires d’une pétition contre la loi Debré.
L’avenir de la laïcité dans l’école est en jeu.
Il est temps pour nous, pour qui la Laïcité est un principe essentiel, de nous mobiliser et de mobiliser pour préserver notre système laïque d’éducation chèrement acquis par nos prédécesseurs et qui permet d’empêcher l’embrigadement des enfants. Nous devons agir pour que le CNAL et les CDAL redeviennent  le fer de lance du combat et non pas seulement de la défense laïque, qu’ils soient en capacité  de prendre à tout moment les initiatives qui s’imposent. La Fédération des DDEN aura, cette année la responsabilité de présider ce Comité d’Action Laïque. Faisons en sorte qu’il soit reconnu comme force de propositions et d’action par tous les autres partenaires du champ laïque. C’est un choix de civilisation, un choix politique, au sens noble du terme et nous sommes à la croisée des chemins. Si, pour certains, il y a plusieurs écoles dans la République, pour nous, il n’y a qu’une école de la République, c’est la nôtre, l’école laïque (...)

Une mystique de la loi (on sent qu'on a affaire à des rebelles), avant toute référence à l'éducation ...
Résolution générale

Réunis pour leur 95ème congrès national à Gérardmer le 27 juin 2009, les Délégués départementaux de l'Education nationale réaffirment leur attachement indéfectible :
- aux valeurs de la République exprimée dans la Constitution : "La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale".
- à loi loi de 1905 de séparation des églises et de l'État.
Ils rappellent que la laïcité est universelle, (...)


Service public ?

Le Délégué Départemental de l'Education Nationale vous dira peut-être qu'il défend les services publics.
Voyons la situation... Il exerce une délégation de service public, alors qu'il n'est lui-même qu'un pékin privé. Il a été choisi, non pour ses compétences, mais pour sa partialité.
Il prend sans scrupule la place d'un fonctionnaire de police ou d'éducation.
Les délégués départementaux de l'Education Nationale sont plus de 25 000. On pourrait calculer le nombre de postes de fonctionnaires qu'ils contribuent à supprimer.
Pour privatiser les activités de service public, les DDEN montrent au gouvernement la voie la plus sûre. Il suffit d'affecter ces activités à des individus ou à des associations qui signent les mêmes pétitions que les syndicats de fonctionnaires. Les défenseurs du service public n'y voient que du feu. Ensuite, tout est possible.


Retour
Contreculture. DDEN Version 1.0