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Albert Regnard 

(1832 - 1903)


Socialiste prolet-aryen

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       Sous Napoléon III, Albert Regnard est le leader des étudiants blanquistes. Libre-penseur, il représente la France à l'anti-concile de Naples en 1870. Il fait partie des plus radicaux pendant la Commune de Paris. Il défend les mesures les plus féroces. Lors de la répression, il se réfugie à Londres. Il y perd ses illusions sur la conspiration blanquiste, et se rallie à Gambetta.
Comme Eugène Gellion-Danglar, Albert Regnard habille ses délires du voile de la science. Il préfigure l'anti-communautarisme actuel dans son aspiration à une France forte (centralisée), une (aryenne) et indivisible (hiérarchisée) .



Au cours des années 1870, il fait des conférences et publie des "Etudes de politique scientifique" : Les principes de la révolution et du socialisme ; la révolution sociale, ses origines, son développement et son but ; L'Athéisme.
Il écrit aussi une série d'articles de "philosophie politique et sociale" : Du respect dû à l'Etat et aux lois, De la Force révolutionnaire, Du rôle de la Commune de Paris.


Pour un Etat fort...

La société "doit reprendre son équilibre, châtier ceux qui veulent s'y opposer", et finalement adopter cette devise positiviste "Ordre et progrès !". Fi du "formalisme démocratique" et de la liberté de la presse sous la Commune : "Autre scrupule, celui d'une soit-disant liberté (...)".
" Il n'y a pas en France plus de 8 à 10 000 coquins qui nous gouvernent et auxquels la masse des imbéciles et des flatteurs obéit. A ceux-là, point de pitié, que la mort nous en débarasse".
(Marc Crapez, la gauche réactionnaire, p 78, citant les écrits de Regnard dans La nouvelle République N° 13 et 15 ; L'affranchi N° 6)

"Au-dessus de l'autorité du nombre plane celle de la Raison, c'est-à-dire de la vérité démontrée (...) La République Démocratique est au-dessus des manifestations mêmes du suffrage universel."
(L'Etat)

"Ceux qui font reposer la société sur la soi-disant liberté morale et la "dignité de la personne humaine" suppriment en réalité la notion du droit public."
(L'Etat)


... qui soit un modèle universel...

"Ce qui est certain, ce qui est glorieux, c’est que, parmi ces nations, le Peuple Français est le représentant le plus direct, le plus digne successeur de ce peuple Romain qui réalisa cette grande conception de l’État universel, de l’humanité ne formant qu’une seule famille et qu’un même faisceau…"
(L'Etat)


... refusant sciemment les identités régionales ...

"Le département, qu'on le remarque bien, est une unité toute factice, abstraite en quelque sorte et ne répondant pas à une réalité objective ; c'est pour cela même que la Révolution l'a substitué aux provinces, subdivisions très réelles, au contraire, obstacles insurmontables en ce sens à la constitution d'un pouvoir central, à l'établissement de la République une et indivisible"
(L'Etat, p100)


... pour que n'existe que Paris !

"Par la seule dictature morale et intellectuelle des grands centres, nous pourrons conserver la République de nos rêves, celle que nous voulons et qu'il nous faut : la république une et indivisible, démocratique et sociale"
(La Nouvelle République, N°19. 1877)


L'eugénisme d'Etat ; Le darwinisme social

… s'il est des pays comme la France, où il est urgent d'encourager la reproduction de l’espéce humaine, il y en a d'autres où il pourrait être bon de la restreindre.
… je prétends que l'Etat a aussi le devoir de se préoccuper, non plus seulement de la quantité, mais encore de la qualité de la population, et cela dans l'intérêt des individus aussi bien que de la collectivité.
ce qu’il faudrait pouvoir empêcher, c’est le mariage et la reproduction des gens entachés de « misère physiologique », des épileptiques, des aliénés, des phthisiques, pour ne citer que les cas les plus désastreux. (…) Car c’est un fait désormais acquis et incontestable, grâce aux admirables travaux de Darwin sur l’Évolution, que l’hérédité domine la vie humaine, comme elle domine la biologie toute entière (…)

Vu l'ignorance du public en pareille matière, il serait bon que dès à présent, par tous les moyens en son pouvoir, par des affiches permanentes dans les mairies etc. l'administration fit connaître aux gens à marier, d'après les données indiscutables de la Science, les dangers auxquels ils s'exposent en entrant dans une famille entachée de maladies graves et transmissibles. (…)
De plus, un article de loi devrait ériger en cas de divorce, non seulement la folie et l'épilepsie, la phthisie et le cancer confirmés, mais encore l'hystérie grave (…).
Au surplus, et bien que la chose soit un peu plus difficile, il est temps d'essayer de faire pour l’espèce humaine ce que l'on a tenté déjà, et avec plein succès, pour les animaux et pour les plantes.
(L'Etat, pages 188 à 196)



Le socialisme prolet-aryen à la française

Dans le journal La Libre Pensée, Regnard affute son antisémitisme. Il se "refuse à accoupler la horde juive et la Grèce antique" (La Libre Pensée, N° 2).

Au premier Congrès international de la Libre Pensée, Regnard exprime la croyance commune des libres penseurs :

Le monothéisme est la plus terrible et la plus désolante des formes religieuses. Incompatible avec la science aussi bien qu'avec l'esthétique, il anéantit la raison et la liberté (...). Le Monothéisme, en se substituant chez les Aryens au Polythéisme, a fait subir à l'esprit humain une effroyable rétrogradation (...) due essentiellement à l'influance de la race sémitique, qui a su imposer sa propre religion au monde il y a quelques quinze cents ans, -comme elle est en train d'imposer aujourd'hui, en accaparant toutes les richesses, et plus complètement que jamais, son implacable domination. Le discours du citoyen Albert Regnard est salué d'applaudissements unanimes .
(Compte-rendu du Congrès universel des libres penseurs, 15-20 septembre 1889, p 98-100)

Les vrais antisémites ne sont ni protestants ni catholiques. Regnard revendique l'antisémitisme authentique pour les seuls libres penseurs :

"... Il suffit de constater que l'antisémitisme est combattu par les protestants et par l'immense majorité des journaux chrétiens et rétrogrades, presque tous, d'ailleurs, aux mains des juifs " (A Regnard, La renaissance du drame, p 118)

En 1887, il écrit dans la Revue Socialiste une série de 7 articles intitulés "Aryens et Sémites. Le bilan du christiannisme et du judaïsme". L'ensemble paraît sous forme de livre en 1890, à Paris, aux Editions Dentu. En voici quelques citations.

L'antisémitisme était "à l'ordre du jour" chez les Communards

La vérité est que si le Molochisme Juif n'a pas été publié du vivant de Tridon, c'est que le livre était à peine achevé quand la maladie et la mort lui firent tomber la plume des mains. De plus, et sans vouloir diminuer en rien les mérites du brillant écrivain dont la Révolution et les lettres déplorent la perte prématurée, il est bon de rappeler que la haine du Sémitisme était à l'ordre du jour parmi les jeunes révolutionnaires de la fin de l'Empire, surtout dans le groupe Hébertiste auquel appartenait Tridon. [...]

Nous attaquions sans relâche le Sémitisme et son produit immédiat, le Christianisme - les plus fermes soutiens de l'Empire, sapé dès lors, dans ses bases mêmes, par le réveil de l'esprit philosophique, par la propagande athée du Candide et de la Libre Pensée. Aussi les condamnations pleuvaient-elles : Tridon passa plus de deux années à Mazas et à Ste-Pélagie. Il en est mort, n'étant pas de ceux dont la constitution résiste au manque de grand air et de soleil. Moi-même j'attrapai quatre mois de prison - et la fièvre typhoïde par dessus le marché - pour avoir parlé entre autres choses, du moment lamentable où « le Monothéisme hébreu s'étendit sur le monde, comme une goutte d'huile sur un vase plein d'eau. » Cela soit dit, non pour rappeler de vieilles histoires, mais pour montrer combien les idées anti-sémitiques étaient répandues parmi les révolutionnaires de ce
temps-là.


Les bons Aryens de gauche ; la rénovation sociale n'est pas à la portée de tous les peuples

Ce qui nous réjouit encore, c'est de voir proclamer et répandre par les milliers d'exemplaires de la France juive, cette éclatante vérité, contestée seulement par l'ignorance des naïfs ou la mauvaise foi des intéressés : - la réalité et l'excellence de la race Aryenne, de cette famille unique à laquelle l'humanité doit les merveilles du siècle de Périclès, la Renaissance et la Révolution - les trois grandes époques de l'histoire du monde - et qui seule est en mesure de préparer et d'accomplir l'achèvement suprême de la rénovation sociale.

L'antisémitisme athée est sci-en-ti-fi-que ...

Voilà bien longtemps que je porte dans ma tête l'idée et le plan de ce livre ou vont être établis définitivement, sur les bases inébranlables de la démonstration scientifique, l'actif de nos congénères Aryens et le passif de nos éternels ennemis, les Sémites : le moment est venu de provoquer par l’examen de leur bilan, la banqueroute du Judaïsme et du Christianisme, auxquels nous devons, outre l’abrutissement religieux, l’effroyable développement du régime capitaliste.

Sources  :     Marc Crapez, La gauche réactionnaire, Ed Berg 1999
                   Marc Crapez, L'antisémitisme de gauche au XIXème siècle, Ed Berg, 2002
                   Zeev STERNHELL, La Droite révolutionnaire, 1885-1914, Fayard, 2000
                   Les ouvrages de Regnard : L'Etat ; Chaumette et la commune de 93 , sont téléchargeables sur le site Gallica.bnf.fr


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Contreculture / Regnard V1.0