Pierre Larousse

Pierre Larousse (1817 - 1875)


Lexicographe apitoyé


        Avant d'être un lexicographe, Pierre larousse a été un pédagogue d'État, un pédagogue officiel. Il a écrit et édité de nombreux livres scolaires. Son oeuvre monumentale, le Grand dictionnaire universel du XIXème siècle, paraît de 1863 à 1876.

 Un pédagogue officiel d'une telle envergure exprime une vision consensuelle, nationale.
 Penchons-nous sur un de ses articles pour connaître le consensus français sur la diversité humaine.

       

Article "Nègre".  (édition de 1872)

          " C'est en vain que quelques philanthropes ont essayé de prouver que l'espèce nègre est aussi intelligente que l'espèce blanche. Un fait incontestable et qui domine tous les autres, c'est qu'ils ont le cerveau plus rétréci, plus léger et moins volumineux que celui de l'espèce blanche.           Mais cette supériorité intellectuelle qui selon nous ne peut être révoquée en doute, donne-t-elle aux blancs le droit de réduire en esclavage la race inférieure ? Non, mille fois non. Si les nègres se rapprochent de certaines espèces animales par leurs formes anatomiques, par leurs instincts grossiers, ils en diffèrent et se rapprochent des hommes blancs sous d'autres rapports dont nous devons tenir grand compte.
            Ils sont doués de la parole, et par la parole nous pouvons nouer avec eux des relations intellectuelles et morales, nous pouvons essayer de les élever jusqu'à nous, certains d'y réussir dans une certaine limite. Du reste, un fait plus sociologique que nous ne devons jamais oublier, c'est que leur race est susceptible de se mêler à la nôtre, signe sensible et frappant de notre commune nature. Leur infériorité intellectuelle, loin de nous conférer le droit d'abuser de leur faiblesse, nous impose le devoir de les aider et de les protéger."
         
           Les Allemands ont connu un racisme d'État, qui était un racisme de rejet, quand ce n'était pas d'extermination. Ils ont toujours été de piètres colonisateurs, peut- être à cause de ce racisme de rejet.
        Les colons anglais, plus méfiants envers les généralisations et les grands concepts, n'ont pas fait des races humaines un enjeu. Ils ont colonisé d'immenses territoires. Une fois les opérations coloniales terminées, ils se retrouvaient entre eux à boire du whisky et jouer au cricket dans des clubs réservés. Aujourd'hui comme hier, ils acceptent un pluralisme culturel et ethnique que l'on stigmatise en France du nom de "communautarisme". Le pluralisme anglo-saxon heurte les Français par son absence de messianisme.

     
         Le racisme français traditionnel, popularisé par Jules Ferry, Paul Bert ou Victor Hugo, possède des caractères particuliers. A côté du racisme de repli, il existe une variété spécifique, liée non pas au rejet mais à la pitié. C'est de cette pitié que découle la mission charitable d'apporter aux Noirs le salut de la civilisation. Ainsi s'amalgame impérialisme, droit d'ingérence et devoir d'humanité. Le racisme de pitié justifie, mieux, sanctifie la colonisation.
             Les Français ont le devoir, comme le dit Pierre Larousse et comme le diront après lui Jules Ferry et Victor Hugo, d'aider et de protéger les races inférieures. Ils n'abandonneront leur mission de colonisation salvatrice que malgré eux, lorsqu'ils auront été chassés.
               Le plus étonnant, c'est que même aujourd'hui les Français ne comprennent pas vraiment  pourquoi ils ont été chassés. Ils n'ont toujours pas renoncé à leur mission. Leur historiographie frappe encore du sceau de la générosité toutes les actions d'expansion nationale, y compris les plus inhumaines.

Quand donc les Français arrêteront-ils de se vouloir les rédempteurs de l'humanité,
alors que la France laïque n'est plus aujourd'hui la source mythique, mais seulement le musée de la rédemption civile ?



                Pierre Larousse n'est ni le seul, ni le dernier pédagogue officiel à diffuser le racisme français. L'encyclopédie Hachette Les Merveilles des races Humaines, qui date du début du XXème siècle, est du même tonneau. On s'extasie devant des différences que transcende sans difficulté la race blanche, et au delà, le type français.

Voici un large extrait de l'avant-propos de cette encyclopédie :

              (...) Faut-il, avec les monogénistes, prétendre que tous les hommes descendent d'un couple unique et primordial ? Doit-on, avec les polygénistes, avancer que les espèces sont multiples, que chaque pays a son humanité propre, comme il a sa faune et sa flore, et qu'il existe des races autochtones ? (1)
              (...) Quel spectacle nous offre donc aujourd'hui l'humanité ? Une variété infinie, au point de vue de la couleur de la peau et des traits du visage, de la forme du crâne et des proportions du corps, de l'esprit non moins que du sang, des phénomènes sociaux, des aptitudes, du degré atteint dans l'échelle de la civilisation.
              La Race Blanche, au profil harmonieux, régulier, progresse dans une activité fiévreuse, triomphe dans la Science après avoir excellé dans les Arts, s'efforce de plus en plus vers un idéal mesuré, raisonnable, pratique. La Race Jaune, épuisée sans doute d'avoir engendré une des premières civilisations et les plus anciennes philosophies, réagit partiellement contre un passé qui l'écrase et, hostile aux conceptions modernes, passe dans ses villes murées des jours gris, ombre diaphane, d'aspect fragile, aux yeux bridés, au nez épaté, qui semble vouloir se volatiliser parmi l'âcre fumée de l'opium. Sommeil ? léthargie ? où se préparent peut être des forces nouvelles ?...
            La Race Rouge, sauvage à la façon des grands oiseaux de nuit que la lumière du jour éblouit, disparaît peu à peu d'un monde où la forêt vierge, où la place elle-même, lui sont de plus en plus mesurées. La Race Noire, enfin, - la plus proche de la nature,- brutale, solide dans sa taille bien prise, la face et le crâne en bélier, le nez écrasé, l'oeil bestial et la chevelure crépue, dispute à l'invasion blanche ses villages, ses chasses, ses libertés.
                Ainsi, entre les quatre races qui peuplent la terre, des différences profondes, physiques et morales, existent, insondables.
               (...) Autant de problèmes passionnants que rappellera chaque page de ces "Races humaines", où voisinent tous les types de l'humanité : du nègre bestial à la blanche délicate, du monstre informe à la plus esthétique beauté...

            (1) Au sujet du polygénisme, voir Voltaire

            En ce qui concerne le type français, il suffira de citer le titre des paragraphes pour se faire une idée de l'intention et du travail ethnologique : "Paris, image de la France" ; "Elévation du caractère français" ; "Peuple de goût et de travail" ; "Les défauts des qualités". Inutile d'insister.

           Et nous autres Bretons ?...  
           Eh bien , il fallait s'y attendre, nous sommes pittoresques. C'est d'ailleurs le cas de tous les "provinciaux".
           Le pittoresque, c'est la dernière station ethnologique avant le terminus, qui est le dérisoire.

"Bretons mélancoliques, vivant parfois comme dans un rêve, mais soutenus dans la vie réelle par une tenace volonté".

Pour en savoir plus sur notre type celtique, il faut se référer à ce que l'encyclopédie rapporte de nos cousins Irlandais :

         " On connait les Irlandais pour leur imagination vive, leur enthousiasme, leur promptitude d'esprit, leur coeur chaud, leurs emportements vite apaisés, leur valeur insigne sur les champs de bataille ; mais ils manquent de patience et de détermination. Leurs qualités aboutissent moins à la grandeur nationale qu'à l'originalité des individus. L'Irlande a produit sa grande part d'hommes supérieurs dans toutes les spécialités de la vie publique, mais peut-elle se gouverner elle-même ? Cette question du "home Rule" divise depuis longtemps les Anglais : les uns disent les Irlandais incapables de sacrifier leurs intérêts privés à la cause publique ; d'autres répondent que leur sentiment national est assez puissant pour contrebalancer ce défaut.
           Presque tous les paysans irlandais sont apathiques, imprévoyants, prenant la vie comme elle vient ; mais il ne faut pas oublier que jusqu'à ces dernières années on n'a presque rien fait pour les encourager à cultiver rationnellement leur sol. Ils ont un caractère joyeux, serein, même au milieu des difficultés de la vie.
           Tous sont remarquablement frugaux ; la bouillie de farine d'avoine, la soupe aux pommes de terre, le lait, forment presque toute leur nourriture. Ils boivent en énorme quantité un thé d'une force extraordinaire ; le visiteur qui entre dans une chaumière du Donegal y voit toujours le pot à thé bouillir sur un feu de tourbe qui ne s'éteint jamais ; ce thé leur coûte cher ; mais c'est la seule prodigalité qu'ils se permettent ; c'est d'ailleurs à cet usage excessif du thé qu'on attribue le grands nombre des cas de folie qui affligent l'Irlande."
Fileuse irlandaise

" Fileuse irlandaise. C'est de ses vieilles mains que sont filées les laines fameuses dans le monde entier"

    Les Celtes seraient-ils les nègres rouquins de la vieille Europe ?


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Contreculture / Larousse version 1.0